Beamo, Leszek Możdżer

Publié le 31 mars 2025 à 21:01
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Une expérience musicale fascinante de la pop star du jazz polonais et de son trio unique : Leszek Możdżer, Lars Danielsson et Zohar Fresco, qui célèbrent leurs 20 ans comme l'un des trios les plus célèbres du jazz avec « Beamo », un album qui réaffirme leur talent artistique tout en s'aventurant avec audace sur de nouveaux territoires sonores.
En juillet 2004, lorsque Leszek Możdżer, Lars Danielsson et Zohar Fresco se produisirent ensemble pour la première fois dans la vieille ville de Varsovie, rares étaient ceux qui auraient pu prédire que ce trio deviendrait l'un des ensembles les plus durables et les plus célèbres du jazz. Aujourd'hui, 20 ans plus tard, ils reviennent avec « Beamo », un album qui non seulement réaffirme leur maîtrise, mais ouvre également un nouveau chapitre audacieux de leur histoire musicale.
Au cœur de « Beamo » se trouve une extraordinaire expérience tonale. Leszek Możdżer redéfinit les conventions établies par des maîtres des XVIIe et XVIIIe siècles comme Bach et Rameau, s'affranchissant du tempérament égal, qui divise l'octave en douze intervalles égaux. Si ce système a dominé la musique pendant des siècles, Możdżer en défie les limites, le décrivant comme « une douloureuse pixellisation de la musique, réduite à douze tons obligatoires ».
Pour Beamo, Możdżer utilise trois pianos à queue aux accordages uniques : un au standard moderne de la = 440 Hz , un autre à la = 432 Hz, et un troisième en accordage décaphonique, divisant l'octave en dix intervalles égaux. Cette approche n'abandonne pas la tonalité, mais la remodèle, créant une instabilité tonale à la fois intrigante et d'une beauté profonde. Lars Danielsson navigue avec brio dans ce nouveau paysage sonore, tissant ces tonalités distinctes avec la voix profonde et résonnante de sa contrebasse. Son talent d'improvisateur est encore plus mis en valeur lorsqu'il joue de la viole de gambe sur des morceaux comme Decaphonesca, adaptant ses frettes à l'accord décaphonique. Zohar Fresco, quant à lui, offre une base rythmique d'une profondeur et d'une complexité extraordinaires, ses percussions scintillant de détails complexes qui forment un univers à part entière. Chaque morceau de Beamo est une narration unique. Dans Kurtu, le désaccord délibéré crée une tension émotionnelle, tandis qu'Ambio Bluette explore les doubles tonalités à travers l'interaction des mains gauche et droite de Możdżer. Catusella rend hommage à l'emblématique Asta de Danielsson, mêlant deux pianos accordés différemment dans un dialogue fluide. Malgré son caractère expérimental, Beamo reste ancré dans le style signature du trio, marqué par le lyrisme européen, la qualité sonore classique et l'interaction de solos virtuoses. Il y a pourtant une dimension supplémentaire, un écho aux sonorités riches et imparfaites de la musique ancienne, rappelant les clavicordes et les épinettes. Cette synthèse entre résonance historique et innovation moderne est sans équivalent dans le jazz contemporain.

Paru, 28 mars 2025
2025, ACT Music + Vision GmbH & Co. KG

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